La colonisation portugaise
Fondé vers le XIIIe siècle, le Royaume du Kongo est déjà puissamment établi à l'arrivée des Portugais en 1482, à l'embouchure du fleuve Congo. Couvrant tout le nord de l'Angola, il s'étendait également sur une partie du sud-est du Congo-Brazzaville et dans le sud de la RDC, avec une longue façade maritime. Tout l'espace Kongo coïncidait avec une aire de transition géographique entre la forêt dense au nord et la savane arborée au sud. Sa capitale était Mbanza Congo. Le terme " Kongo " fut et demeure chargé de prestige et de gloire.
L'histoire du Royaume du Kongo est une histoire complexe : celle de souverains, celle d'une société et d'une civilisation créatrices, celle de relations internationales précoces. Dès la deuxième expédition de Diego Cão qui cette fois remonte le fleuve, des traités sont rapidement signés entre le quatrième des rois kongo, Nzinga a Nkuwu, et les souverains portugais. Les missionnaires catholiques suivent. Le roi kongo, Nzinga a Nkuwu, se fait baptiser ainsi que plusieurs notables en 1491. Il adopte le nom de João Ier, par déférence envers le souverain portugais régnant. Il est le premier converti quoique pas encore vraiment chrétien convaincu. Son successeur, Afonso Ier (1506-1543), à l'inverse, s'engage davantage et soutien l'évangélisation. Il fait oeuvre de grand réformateur en favorisant la formation d'une classe lettrée.
Malgré de nombreuses contestations et divisions avec les Portugais, les échanges commerciaux s'intensifient et la traite des esclaves s'organise. Elle se poursuivra jusqu'à la moitié du XIXe siècle. Pendant plus d'un siècle, le Royaume du Kongo lutte aussi contre les autres royaumes indigènes mais s'avilit à demander de l'aide militaire au Portugal.
Garcia II Afonso (1641-1661), souverain brillant, a été le dernier des rois kongo à pouvoir mener une politique internationale jouant de la compétition entre Portugais, Espagnols et Hollandais. Avant la fin de son règne, sa souveraineté est limitée par un nouveau traité en faveur des Portugais. Le conflit armé est inévitable et son successeur, Antonio 1er est tué et décapité par les Portugais sur le champ de bataille en 1665. Le Royaume du Kongo, enclin aux rivalités internes et à l'anarchie, va commencer à se déchirer. Il ne se relèvera plus jusqu'à son démembrement en 1884 à la conférence de Berlin.
Le système religieux des Kongo est pluraliste. Il l'est demeuré longtemps après la christianisation. La fureur inculte des missionnaires catholiques et de leurs collaborateurs a ravagé, au long des siècles, les oeuvres originelles des artistes et des artisans kongo. Quelques rares pièces ont pu être sauvées. La symbolique chrétienne est devenue en quatre cents ans un des éléments constitutifs de la civilisation kongo.
L'apport historique original du Kongo est la réalisation d'une union très ancienne entre la christianisation et les conceptions et croyances traditionnelles de l'Afrique subsaharienne. Au début du XVIIIe siècle, une jeune aristocrate, doña Béatrice, a été condamnée au bûcher comme hérétique pour en avoir appelé à saint Antoine, le " second dieu ", pour la restauration du Royaume dégradé, l'indépendance et la prospérité des gens du Kongo. Elle avait cru trop tôt en un christianisme " africanisé ".
Rainha Ginga, une figure angolaise
Il se peut qu’un personnage de l'histoire angolaise vous intéresse plus que d’autres, mais quoiqu’il en soit, vous ne pourrez pas passer à côté de la fameuse reine Ginga (1587-1663) et particulièrement du rôle « d’arbitre » qu’elle joua entre colonisateurs portugais et hollandais afin de protéger son peuple. En raison de sa personnalité, nous vous racontons la belle histoire française de Rainha Ginga. Cette histoire existe par la volonté d’un avocat et journaliste français Jean-Louis Castilhon, né à Toulouse en 1720, qui décida d’écrire un roman : Zingha, reine d'Angola : Histoire africaine (réédité en 1992, édition établie et présentée par Patrick Graille et Laurent Quillerie).
C’est donc bien elle, Ginga la reine implacable (la graphie varie d’un pays à l’autre: Ginga, Jinga, Njinga, Nzinga, Zingha etc.), qui servit de modèle au tout premier roman de caractère africain jamais écrit en Occident. Celle-là même qui régna pendant 40 ans et mourut à 82 ans. Et il nous vient naturellement cette question : comment Ginga Mbandi, la double souveraine de Ndongo et Matamba, a-t-elle pu impressionner notre jeune toulousain jusque-là ami des fleurs et des sciences au point qu’il en fasse une héroïne de roman ? Nous sommes alors aux temps des Lumières, Castilhon est encyclopédiste et les faits ou méfaits de Ginga ont déjà été célébrés de son vivant dans des récits de religieux ou de voyageurs « de commerce » de retour d’Afrique. Il publie alors cette utopie en 1769 et ce faisant il propose la première biographie romancée jamais écrite sur une personnalité africaine. Le livre a, semble-t-il, eu un certain succès, les portugais refusèrent de le traduire alors que les hollandais s’empressèrent de le faire. Castilhon, homme des Lumières oublié chez nous, ne se doutait certainement pas de la portée sociale que sa création littéraire initierait 3 siècles plus tard. Grâce à ses écrits sur la guerrière implacable aux deux royaumes, Castilhon a réveillé puis nourri au sein de la communauté angolaise un personnage : Ginga, une femme empreinte d’une forte volonté d’indépendance à la fois Kilyanje (chef militaire) et femme politique. Mais Castilhon a aussi permis de susciter au sein des communautés d’origine négro-africaine d’Amérique et des Caraïbes l’émergence d’une figure emblématique féminine, noire et forte.
Cela dit, pour qu’il y ait représentation, pour faire naître l’icône, il lui fallait une image. Là aussi, c’est à un français que Ginga, femme africaine, doit sa belle apparence. C’est le peintre, illustrateur et graveur Achille Devéria (1800-1857) qui fit son pseudo-portrait tout en grâce et élégance quelques 60 ans après la parution du roman !
Dès lors la reine Ginga pouvait naître dans l’imaginaire collectif, peu importait alors qu’elle eut été traitée de « femme-homme » dans les premiers écrits de son confesseur Cavazzi, peu importait toujours qu’elle soit apparue comme une femme corpulente sur les rares gravures que l’on a de son époque. La guerrière était belle et cela suffisait à parfaire son image d’héroïne.
Ainsi s’achevait la période de gestation française de Ginga, mais pour vivre à jamais, il lui fallait une représentation, une statue angolaise à sa mesure. Ce fut chose faite au retour de la paix dans le pays. La statue faite en bronze, mesurant 5 mètres de haut et pesant 4 tonnes, fut installée place Kinaxixi en 2002.
La statue est aujourd'hui installée à l'entrée de la Fortaleza.
Article rédigé par Mireille Rousseau.
Le commerce des esclaves
Le commerce des esclaves, qui domine amplement les activités portugaises sur le sol angolais pendant près de trois siècles, détermine les liens entre les Portugais et les royaumes angolais. Les effets de la traite sur les pouvoirs locaux sont contrastés. Le Royaume du Kongo décline dès la deuxième moitié du XVIe siècle alors que le Royaume de Ndongo se renforce, comme les royaumes du haut plateau central qui profitent également de leur position d'intermédiaires dans ce commerce avec les Portugais. Le Royaume du Ndongo était gouverné par le Ngola. Ce titre sera choisi par les Portugais pour nommer plus tard l'ensemble de la région sous leur contrôle et devenir l'Angola.
Les esclaves qui transitent par les ports atlantiques se voient déportés principalement vers le Brésil et vers les plantations de sucre portugaises de l'île de São Tomé. Un tiers de l'ensemble des esclaves exportés d'Afrique dans le cadre de la traite atlantique serait passé par les ports d'Angola et du Congo. En raison de sa faible densité de population, l'Angola ne fournit qu'une partie de ces esclaves. Dès la fin du XVIIIe siècle, ceux-ci proviennent en majorité de la RDC et de la Zambie actuelles.
Au XIXe siècle, le Portugal passe progressivement de la traite des esclaves à l'occupation coloniale. Malgré l'abolition de l'esclavage dans les colonies africaines du Portugal en 1869, la traite s'est poursuivie illégalement pendant encore une vingtaine d'années jusqu'à ce que l'esclavage soit officiellement aboli au Brésil en 1888.
Le Portugal, après la fin de la traite des esclaves, s'est concentré sur le contrôle du commerce et des revenus dérivés de l'exploitation du caoutchouc et du café. La pression fiscale nouvellement imposée par Lisbonne (1906) et le déclin du commerce du caoutchouc suscitent des révoltes successives de plus ou moins grande ampleur.
Au début des années 1920, au prix d'un effort militaire considérable, le Portugal étend sa souveraineté sur une partie importante de l'Angola, et surtout sur les principales ressources commerciales du pays.
La première République est instaurée au Portugal en 1910. La conquête militaire, commencée dans les dernières années de la monarchie portugaise, se fait surtout sous l'impulsion des républicains. Ce sont eux qui, au cours de ces années charnières, mettent en place un véritable système colonial en Angola et dans les autres possessions portugaises d'Afrique.
Avec l'aimable autorisation du petit Futé Angola
Auteur : Dominique Verdugo